Un nouveau programme d’accompagnement à la création d’entreprise Entrepreneur#Leader vient d’être lancé par la région, nous en faisons partie (modestement) !
Ce dispositif se présente en trois phases (bâtir mon projet / financer mon projet / piloter mon entreprise) qui consistent principalement en des heures de conseil (maximum 12h/an) ou à de l’accès à des prêts d’honneur.
Nous aurions cependant aimé un peu plus de prise de risque de la part des pouvoirs publics dans ce « parcours unique de la création d’entreprise » , pourquoi ?
De la même façon que l’approche française de la rénovation des quartiers (défavorisés, ou sous-investis ou dit « politique de la ville ») a privilégié l’investissement sur le bâti (facile à quantifier) plutôt que la réflexion sur les potentialités et les opportunités présentées par chaque contexte humain spécifique à chaque quartier (plus compliqué), l’approche française de l’accompagnement à la création d’entreprise a privilégié le hors sol ( approche centralisée, essentiellement exprimée en un nombre d’heures de conseil appliquées à un nombre de bénéficiaires cibles) plutôt que la prise en compte des contextes humains spécifiques et localisés qui, au finish, font qu’un endroit est plus favorable qu’un autre à la création, au développement et au renouvellement d’un tissu d’entreprises.
Pour être juste, il faut reconnaitre qu’un certain nombre d’initiatives existent pour travailler ce terreau là : il s’agit de l’approche dite de Cluster (regroupement d’entreprises d’un même secteur pour mettre en commun un certain nombre de moyens, de l’information et des pratiques) ! mais celle-ci, si elle fonctionne parfois bien, s’adresse à des entreprises spécifiques , spécialisées sur un secteur et pour la plupart ayant déjà quelques années d’existence.
Or ce qui fonctionne pour les grandes entreprises, c’est à dire les connections, la mise en réseau, la fréquentation de concurrents, de fournisseurs, de salons, de colloques etc et qui favorise l’émergence et le développement d’opportunités, fonctionne également pour les plus petites entreprises et de façon démultipliée : car la petite entreprise a encore bien plus besoin des autres et d’un contexte favorable qu’une entreprise plus grande qui aura internalisé tout une partie des ressources qui lui sont nécessaires. De plus, le nouvel entrepreneur a aussi besoin des autres pour créer, imaginer, se rassurer, être challengé, être soutenu…
De nombreuses études ont creusé ce point depuis plus de 30 ans montrant que L’environnement hyper local est le déterminant majeur pour la création de conditions favorables au développement d’un tissu de petites entreprises :
Une étude réalisée en Suède en 1988 (Johannisson , Business Formation – a Network Approach) résume le travail de l’entrepreneur comme celui d’un « Networking Man / Woman » « Un Homme ou une Femme de réseaux » et les réseaux sociaux sont encore loins !
L’entrepreneur va devoir en effet mobiliser des ressources externes à lui même pour imaginer, exprimer, mettre en place et faire perdurer son projet. L’étude illustre à travers différents cas comment l’entrepreneur va s’appuyer sur différents types de réseaux et de liens plus ou moins forts pour développer un projet dont il sera le premier bénéficiaire.
L’auteur explique également comment l’entrepreneur , être égo-centré par nature sera capable de s’insérer et de se maintenir dans des communautés (pas forcément business) moyennant un certain nombre de concessions à son égo-centrisme pour en tirer en retour un certain nombre de bénéfices.
Un contexte social favorable (existence de réseau formels ou informels actifs) au niveau local, bénéficiera au territoire dans son ensemble entrainant un cercle vertueux permettant le développement d’un tissu dense de relations qui a leur tour favoriseront l’émergence de nouveaux projets…le Développement de la Silicon Valley ne montre pas autre chose.
En France le réseau des chambres de commerce et d’industrie participe sans doute un peu à l’établissement de communautés d’entrepreneurs, mais sans doute de façon très restreinte.
Ces institutions sont essentiellement occupées à gérer la partie commerciale de leur activité (établissement de formation, ventes d’heures de conseil…) ou à dialoguer de façon utile avec le politique mais ne constituent pas et n’animent pas vraiment un réseau large (32 membres dans les Hauts de Seine par exemple pour 80 000 entreprises présentent sur le territoire).
D’autres initiatives tentent de comprendre, de s’insérer, de favoriser et d’utiliser la multitudes de liens forts et faibles qui existent ou pourraient exister entre les habitants d’un territoire, ses usagers, ceux qui y travaillent pour favoriser l’émergence et la pérennité de projets économiques.
La reconnaissance de l’importance de ces liens qui forment de fait une ou plusieurs communautés et le travail sur leur développement et les liens qu’elles peuvent entretenir entre elles est en soi le moyen le plus sûr et sans doute le plus économique de développer ou re-développer un tissu résilient d’activités.
Pas un parcours unique de la création d’entreprise donc , mais une multitude de parcours déterminés par une multitude de liens, d’occasions…et favorisé par l’existence de multiples communautés et de multiples appartenances plus ou moins fortes.
Travailler là dessus en se sentant un peu moins seuls demanderait juste un peu plus de confiance de la part des pouvoirs publics et un peu d’appétit pour expérimenter. C’est peut être le moment .